Dans ce blog se promènent des femmes inspirantes. Pour Maria-Mercè Marçal, parler en tant que femme c’est d’abord dire la part blessée du corps, c’est parler depuis son corps :
« Je me mets à genoux devant
le corps
impur
obscène
mortel
premier
pays
vivant
cercueil
ouvert
d’où je
proviens
il n’y
a pas,
mère, d’autre naissance. »
C’est parler du monde indompté, de sa frange indicible :
« Je rends grâce au hasard de ces trois dons :
être née femme, de basse classe, de nation opprimée.
Et de ce trouble azur d’être trois fois rebelle. »
C’est collectionner l’éclat fragmenté des jours :
« Je monterai la tristesse au grenier
avec le parapluie cassé, la poupée borgne,
le cahier périmé, la vieille tarlatane.
Je descendrai les marches dans la robe de joie
qu’auront tissée des araignées toquées.
Il y aura de l’amour émietté au fond des poches. »
C’est dire la dimension translucide de la mort :
« Rien ne te sera pris : seul viendra
l’instant d’ouvrir
docilement la main
de libérer
la mémoire de l’eau
pour qu’elle se retrouve eau
de la haute mer. »
Maria-Mercè Marçal, Trois fois rebelle, éditions Bruno Doucey, 2013, pages 101; 9; 21; 87. Traduit du catalan par Annie Bats